La
restauration numérique des images cinématographiques
Le film cinématographique est un matériau à part
et la connaissance des caractéristiques intrinsèques
de ce matériau ainsi que sa manipulation (en ce qui
nous concerne sa numérisation) nécessite une
expérience pratique que l’équipe FAV :ORI
a pu acquérir depuis le commencement des activités
de recherche sur ce domaine (1995), sur le terrain, et lors
de discussions et d'échanges avec des spécialistes
du domaine.
Avec l'avènement prochain des filières tout
numérique (tournage, post-production et projection
numérique), le film cinématographique à l'histoire
plus que centenaire risque rapidement de devenir aussi exotique
que les disques vinyles (rappelons que le CD a été introduit
par Philips/Sony il y a vingt an seulement), entraînant également
le déclins des métiers associés (projectionniste,
développement du film, etc...).
De
la restauration traditionnelle à la restauration numérique
Jusqu'à très récemment, la restauration
des films n'était faite qu'avec des méthodes
traditionnelles photochimiques, qui consistent à faire
des tirages successifs du film pour essayer d'en enlever
certains défauts, comme certaines rayures. Malheureusement,
de nombreux défauts restent visibles après
ces travaux
.Avec l'apparition récente de scanners
de film rapides et précis, il est de devenu envisageable
d'un point de vue économique de faire une restauration
numérique des films. Le principe de la restauration
numérique de films consiste à scanner un
film, puis à appliquer aux fichiers numériques
résultants des traitements de restauration, et finalement à reporter
sur la pellicule ces images restaurées (il serait
plus juste de parler de restitution numérique, le
terme restauration impliquant un travail sur le support
original).
Il
s'agit bien sûr d'une schématisation : Le procédé est
plus compliqué et prend plus de temps que la restauration
traditionnelle. Cela requiert également deux machines
très coûteuses en entrée et en sortie
de la chaîne numérique : un scanner (ou
télécinéma Haute Définition)
et un imageur ; sans parler évidemment des ordinateurs
(et de l’espace de stockage, généralement
plusieurs TerraOctets) nécessaires pour effectuer
les traitements.
Evidemment, une restauration de film peut se faire en
présentant une à une les images issues de la
numérisation à un opérateur-infographiste
doté d'une palette graphique retouchant chaque image "à la
main". Une solution de ce type est souvent exclue pour
des raisons de coût. L'informatique permet heureusement
d'automatiser un certain nombre de tâches, et c'est
le fondement même des travaux menés par notre équipe.
Ce qu'il faut restaurer
Les rayures, les poussières, les pompages de densité et
les manques de fixité sont typiquement les défauts
qui peuvent être traités automatiquement. La
restauration automatique utilise comme références
les images immédiatement avant et après l'image à restaurer.
Ces références sont d'autant plus fiables que
les mouvements sont faibles. Assimiler un élément
de l'image en mouvement à une poussière est
le plus grand danger, car cet élément de l'image
risque d'être effacé. La sur-correction est
la hantise de tous les conservateurs et archivistes.
Les problèmes de rayures sont les plus fréquents
et les plus difficiles à traiter. Les rayures se caractérisent
par une présence continue verticale sur toute une
séquence d'images. Leur traitement sur station numérique
demande un travail considérable pour des résultats
esthétiques décevants. Si une correction peut
paraître satisfaisante sur une image statique, du fait
de la persistance temporelle de la rayure, elle s'avère
visible en dynamique lors du défilement de la séquence,
notamment si le grain du film est modifié ou pire
si l'information insérée est erronée.
La restauration numérique, dont le coût est
encore sensiblement supérieur à celui d'une
restauration traditionnelle, doit être parfaitement
maîtrisée car les outils automatiques ne sont
pas encore fiable. C'est par contre la seule technique utilisable
si le seul original disponible est par exemple une copie
d'exploitation et si les défauts ont été photographiés
lors de la création de cette copie. C'est dans la
correction de ces défauts et dans une augmentation
de la cadence de traitement que la restauration numérique
est avantageuse, et peut ainsi devenir une alternative intéressante.
Quelques précisions concernant
la résolution des images numériques
On peut prétendre atteindre un enregistrement de
3000 lignes sur la hauteur d'une image négative 35mm.
Mais, lors de la fabrication d'un film, les trois générations
successives permettant l'obtention du marron, du contretype
et de la copie positive, ainsi que les pertes dues
aux projecteurs, ramènent les performances réelles
au niveau de la salle de projection à une résolution
beaucoup plus modeste de 1000 voir 800 lignes sur la hauteur
de l'écran. Au niveau intermédiaire du contretype,
la définition est encore de 1500 lignes sur la hauteur
de l'image. C'est cette définition qui doit être
requise pour les images numériques. C'est, en effet,
au niveau du contretype que celles-ci seront restituées,
après restauration, sur support argentique. Le standard
2K avec ses 2048 pixels sur la largeur et ses 1536 pixels
sur la hauteur de l'image correspond à cette définition.
Numérisation du film
L'obtention des images numériques nécessite
une opération de "scan" des images argentiques.
Aujourd'hui, cette numérisation est effectué sur
des télécinémas haute définition
qui, pour la plupart, permettent l'analyse du film
en standard 2K (2048 x 1536 pixels) ou HDTV 24P (1920 x 1080
pixels).
images
En 2K, cette analyse est effectuée à la
cadence de 4 à 5 images par seconde (sur les scanners
HD disponibles en ce début du XXIeme siècle).
Pour une heure de programme, près de 10 heures de
transfert sont nécessaires - en comptant la manipulation
des bobines, les temps de transfert d'un média numérique à l'autre,
etc..., d'où un coût d'exploitation assez élevé.
Les fichiers générés sont enregistrés
sur des supports informatiques (DTF2 ou DLT par exemple).
La définition moindre du HDTV 24P permet d'effectuer
l'analyse en temps réel sur les télécinéma
de haut de gamme. Les transferts sont beaucoup plus économiques
mais le format 16/9 n'est pas adapté aux films anciens
de format 4/3 pour la plupart. La définition est alors
ramenée à 1400 pixels sur la largeur et 1080
pixels sur la hauteur. Les supports d'enregistrement sont
dans ce cas des bandes vidéo numériques hautes
définitions (Sony HDW-F500 par exemple). Ce standard
sera réservé pour des films dont la qualité photographique
pourra se satisfaire de cette définition relativement
limitée.
Certaines machines actuelles (le Spirit de Grass Valley
(inserer lien vers GRASSVALLEY) ou le C-Reality de Cintel
(inserer lien vers CINTEL) permettent, de par leur cadence
et leur résolution, une exploitation viable en restauration,
encore sont-telles limitées aux films de formats standards
et en bon état. Le mécanisme d'entraînement
de ces machines et la présence d'un dispositif à immersion
interdit le chargement des standards particuliers (8mm, 9.5mm,
17.5mm, 28mm...) et la numérisation de films en mauvais état.
Système informatique de restauration
La particularité de la restauration numérique
d'images animées en terme d’infrastructure informatique
réside dans la quantité importante de données à traiter
et dans la visualisation d'images de haute définition.
En effet, une image couleur numérisée à la
résolution 2K (2048 x 1536 pixels pour chacune des
trois couleurs, sans compression) génère un
fichier de 9,5 Mo. Sachant que le film défile à la
cadence de 24 images par seconde, 5 secondes de programme
représentent plus de 1 Go de données. Le système
doit être particulièrement performant au niveau
des capacités de stockage, des vitesses de transfert
entre machines et entre machines et stockage.
Transfert sur pellicule
Une fois la restauration numérique terminée,
les fichiers sont transférés sur un support
argentique, le contretype, qui permettra le tirage de la
copie restaurée. Cette opération est exécutée à l'aide
d'un imageur (film recorder). Deux types d'imageurs sont
disponibles sur le marché : les imageurs à tube
cathodique et les imageurs à faisceau laser.
Les imageurs à tube cathodique sont basés
sur le principe d'une reprise photographique de l'image
dessinée par le spot sur l'écran en verre
du tube. Ce type d'imageur présente deux principaux
inconvénients : Le spot diffuse dans l'épaisseur
du verre et provoque un halo qui nuit à la qualité de
l'image formée et le rendement lumineux du tube
limite la vitesse du transfert.
Les imageurs à faisceaux laser, plus récents,
sont basés sur le principe d'une image dessinée
directement sur la surface photosensible du film. Le gros
avantage de cette technologie est le fort rendement lumineux
du faisceau, constitué d'une tache minuscule de 6
microns de diamètres, qui frappe directement la pellicule.
Néanmoins, aujourd'hui la qualité des images
obtenues par ces deux types d'appareils reste équivalente.
Par contre les vitesses de transfert sont à l'avantage
de la technologie laser : 3 secondes par image 2K pour le
laser soit 4,5 jours pour un film de 90 minutes, 5 secondes
par image 2K pour le tube cathodique soit 7,5 jours pour
un film de 90 minutes. L'extrême lenteur de cette opération
et les coûts d'exploitation induits sont de réels
problèmes.
Possibilités de la restauration
numérique, éthique
Les possibilités de la restauration numérique
sont énormes (il s’agit de retouche d’images !)
et il est indispensable de prendre un certain nombre de
mesures et de précautions. Pour cela, il a été convenu
de faire la distinction entre deux types de défauts
:
- Les défauts dus au vieillissement et aux diverses
manipulations des éléments tels que les
moisissures, déchirures, décollements de
gélatine, rayures, etc.
- Les défauts dus aux limites techniques des procédés
et des émulsions utilisés à l'époque
tels que les variations de densité, le manque de fixité (du
aux mécanismes et entraînements irréguliers
de la pellicule) ou les voiles photographiques dus aux effluves électrostatiques.
Généralement, après un dialogue nécessaire
avec l'archiviste, la ligne de conduite fixée consiste à se
limiter aux défauts dus aux outrages du temps et qui nuisent à la
perception du film. Les autres défauts liés aux procédés
employés lors du tournage sont, dans certains cas, atténués
afin d'adapter les éléments aux normes modernes d'exploitation.
Par exemple, un important manque de stabilité de l'image ou une
forte variation de luminosité (pompage) sont aujourd'hui difficilement
supportables pour les spectateurs --- notamment lors d'une diffusion télévisuelle.
Il paraît donc raisonnable d'atténuer ces phénomènes
sans toutefois les gommer totalement pour témoigner des qualités
et des défauts de la technique de cette époque et garantir
l'authenticité du document.
En conséquence, une forme de réglage simple doit
permettre à l'opérateur d'adapter la "puissance" de
la restauration à l'usage.
La restauration numérique peut s'avérer
utile dans d'autres cas, comme :
- Nettoyage avant compression MPEG
Dans ce cas, les images sont traitées au format
vidéo. Mais la compression MPEG est relativement
sensible au bruit, au manque de stabilité et aux
variations d'intensités dans son processus de compensation
de mouvement. Une restauration numérique supprimant
les artéfacts les plus gênants et stabilisant
l'image permettra un encodage plus efficace (plus de qualité,
moins de données).
- Accidents de tournage
Certains défauts affectent les tournages récents, typiquement les
rayures (un matériel mal nettoyé, au tournage ou lors du développement
des rushes) et les variations de luminosité (désynchronisation éclairage-caméra).
Généralement, il est hors de question de retourner la scène
--- les planning de productions sont très serrés. La restauration
numérique peut donc jouer son rôle (le coût de cette restauration étant
souvent pris en charge par la compagnie d'assurance).
Les sociétés privées
commercialisant des solutions informatiques pour la restauration
- Snell & Wilcox, \url{www.snellwilcox.com} Produit
ARCHANGEL,
- Teranex, \url{www.teranex.com}Produit imageRESTORE,
- Da Vinci, Produit REVIVAL, \url{www.davsys.com}
- HS-Art Digital Media Produit DIAMANT, \url{www.hs-art.com}
- MTI
\url{www.mtifilm.com}
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